M. X c/ SA LA BANQUE POSTALE RG 2024010966 - jugement du 4 juillet 2025 – chambre 1-10
Mots-clés :
IRRECEVABILITE / Prescription et forclusion
Points de droit :
Point de départ de la prescription - Renonciation à prescrire – Instance pénale et interruption de la prescription civile.
Affirmant que le compte bancaire de son entreprise individuelle n’avait pas été crédité de virements internationaux en 1999 pour des montants avoisinant 190 M€, M. X assigne la Banque Postale en 2024. Celle-ci oppose une fin de non-recevoir pour prescription.
Le demandeur prétend que la prescription n’a jamais commencé à courir, subsidiairement qu’elle aurait été interrompue et, enfin, que la Banque Postale avait renoncé à prescrire.
Le tribunal examine successivement, en premier lieu, le point de départ de la prescription en l’espèce, sa durée normale en l’absence d’interruption, son interruption éventuelle et, enfin, la renonciation prétendue de la Banque Postale à prescrire.
Sur le point de départ, M. X prétend que la prescription n’a jamais commencé à courir puisque la Banque Postale n’a jamais daigné lui répondre sur la réception ou non des fonds concernés. De ce fait, il ne connaissait pas son droit d’agir. Le tribunal répond que ces faits n’entrent pas dans les dispositions du Code civil concernant la prescription et que M. X a nécessairement eu connaissance, au plus tard lors de la clôture du compte le 9 mars 2000, de l’absence des écritures au crédit de son compte, voire dès 1999 lors des virements prétendument omis et que, au plus tard, le point de départ de la prescription est le 9 mars 2000.
Sur la durée de la prescription, le tribunal rappelle qu’elle était de 30 ans à l’époque des faits, mais qu’elle a été ramenée à 5 ans le 19 juin 2008 lors de la réforme de la prescription. Hors interruption, la prescription venait donc à échéance le 19 juin 2013, soit 5 ans après l’entrée en vigueur de la réforme.
Quant à l’interruption de la prescription, le tribunal constate que M. X a bien mis en cause la Banque Postale dans la plainte qu’il a déposée au pénal, ce qui a effectivement interrompu la prescription, selon l’article 2241 du Code civil. Il relève, cependant, qu’il y a eu un non-lieu définitif et un classement sans suite et qu’en application de l’article 2243 du Code civil cette interruption est non avenue.
M. X déclare, enfin, que la banque n’a jamais élevé aucune contestation à la réception de ses courriers et mises en demeure en 2021, qu’elle s’est contentée de demander des précisions sur les opérations litigieuses et qu’elle a ainsi de facto renoncé à prescrire.
Tout en reconnaissant qu’une renonciation à prescrire peut être tacite, le tribunal rappelle qu’elle doit, dans ce cas, résulter de circonstances établissant sans équivoque la volonté de ne pas se prévaloir de la prescription. Or, constate-t-il, la demande de précisions de la banque, saisie plus de vingt ans après les faits, est une réaction bien normale et ne saurait traduire une « renonciation à se prévaloir d’une quelconque prescription ». En l’absence de tout autre élément produit, le tribunal ajoute que le silence ne peut manifester une « volonté non équivoque de renoncer à la prescription ».
Le tribunal en conclut que l’action était bel et bien prescrite depuis le 19 juin 2013 et que la demande de M. X, introduite en 2024, est irrecevable.
Article 2241 du code civil
La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.
Article 2243 du code civil
L’interruption est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l’instance, ou si sa demande est définitivement rejetée.