SARL COURTAGE 24 POURPRE c/ SAS MEILLEURTAUX - affaire jointe SAS MEILLEURTAUX vs Messieurs M et D RG J2025000496 - jugement du 10/09/2025 - chambre 1-5
Mots-clés :
CONTRATS ET OBLIGATIONS / Résolution
DISTRIBUTION ET FRANCHISE / Contrats de franchise
Points de droit :
Résolution par application d’une clause résolutoire et résolution pour inexécution suffisamment grave – Validité de la clause de non-concurrence d’un contrat de franchise.
COURTAGE 24 POURPRE, dont Messieurs M et D sont associés, a signé avec MEILLEURTAUX, pour plusieurs de ses agences, un contrat de franchise, contrat renouvelé plusieurs fois et venant à terme le 2 juillet 2024.
En janvier 2023, COURTAGE 24 a mis en demeure MEILLEURTAUX de restaurer l’équilibre économique du contrat, qu’elle estimait remis en cause par les modifications successives apportées par MEILLEURTAUX. Cette dernière n’ayant pas répondu à ses demandes, COURTAGE 24 a résilié le contrat le 8 février 2023 aux torts de MEILLEURTAUX, et poursuivi son activité dans les mêmes locaux sous une autre enseigne.
COURTAGE 24 reproche à MEILLEURTAUX d’avoir violé son obligation contractuelle de fournir des conventions bancaires à ses franchisés, les mettant dans l’incapacité d’exploiter leur agence, d’avoir manqué à son obligation d’assistance, d’actualisation de son savoir- faire, de bonne foi et de loyauté, et demande des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.
MEILLEURTAUX réplique et demande de juger fautives la résiliation du contrat de franchise et la violation de leur obligation de non-concurrence par COURTAGE 24 et Messieurs M et D, les associés. Elle demande le paiement de la clause pénale prévue contractuellement dans ce cas.
Le tribunal a eu à se prononcer sur :
- La résiliation du contrat de franchise par le franchisé,
- La demande de MEILLEURTAUX au titre de la clause de non-concurrence.
Sur la résiliation par COURTAGE 24 du contrat de franchise
Le tribunal relève que, si la résolution du contrat ne peut résulter de la mise en œuvre de la clause résolutoire contractuelle (les inexécutions invoquées ne faisant pas partie de la liste limitative des causes permettant cette mise en œuvre), elle peut être fondée sur le motif d’une inexécution suffisamment grave prévu à l’article 1224 du code civil, COURTAGE 24 ayant satisfait à la forme prévue par cet article (mise en demeure préalable restée infructueuse). Il retient donc que doit être examinée la gravité de l’inexécution.
Il relève que :
- MEILLEURTAUX exerce une activité d’intermédiaire de crédits et d’intermédiation de services annexes aux prêts,
- Le contrat prévoit, sur la fourniture par le franchiseur de partenaires bancaires, que « le franchisé ne peut en aucun cas passer d’accord contractuel en son nom propre avec un établissement financier ou une compagnie d’assurance ni gérer personnellement la mise en œuvre de ses partenariats »,
- « la réussite de l’Enseigne repose sur un fonctionnement centralisé de la relation des partenariats financiers négociés par le franchiseur ».
Les franchisés ont mandaté le franchiseur pour gérer en leur nom ces partenaires et notamment les banques partenaires. Le fait que ces partenaires bancaires aient rompu leur relation avec MEILLEURTAUX de sa propre faute ou du fait de la conjoncture n’exonérait pas MEILLEURTAUX de son obligation de fournir à ses franchisés des conventions avec des partenaires bancaires. Cette obligation est un élément essentiel du contrat de franchise.
Le tribunal retient que cette inexécution est suffisamment grave pour justifier la résiliation du contrat aux torts exclusifs de MEILLEURTAUX et condamne celle-ci à indemniser son franchisé pour le préjudice en résultant.
Sur la demande d’indemnisation de MEILLEURTAUX au titre de la clause de non-concurrence
Le tribunal relève que le contrat de franchise prévoit que, pour préserver le savoir-faire du franchiseur, le franchisé s’interdit pendant une période de 12 mois sur le territoire de la franchise, de créer, participer ou s’intéresser directement et indirectement à l’exploitation de toute activité concurrente.
Se fondant sur les dispositions de l’article L341-2 II du code de commerce, le tribunal retient que cette clause de non-concurrence, remplissant les conditions cumulatives prévues, est opposable à COURTAGE 24 et la condamne à verser à MEILLEURTAUX la pénalité contractuellement prévue en cas de violation.
Article L341-2 du code de commerce :
I Toute clause ayant pour effet, après l’échéance ou la résiliation d’un des contrats mentionnés à l’article L341-1, de restreindre la liberté d’exercice de l’activité commerciale de l’exploitant qui a précédemment souscrit ce contrat est réputée non écrite.
II Ne sont pas soumises au I du présent article les clauses dont la personne qui s’en prévaut démontre qu’elles remplissent les conditions cumulatives suivantes :
- elles concernent des biens et services en concurrence avec ceux qui font l’objet du contrat mentionné au I,
- elles sont limitées aux terrains et locaux à partir desquels l’exploitant exerce son activité pendant la durée du contrat mentionné au I,
- elles sont indispensables à la protection du savoir-faire substantiel, spécifique et secret transmis dans le cadre du contrat mentionné en I,
- leur durée n’excède pas un an après l’échéance ou la résiliation d’un des contrats mentionnés à l’article L341-1.