LE CERCLE DES JUGES CONSULAIRES DE PARIS
1 quai de la Corse
75004 Paris
N°TVA :

SARL MS SCIENCES c/ SA GENERALI, SA ACM, assureur de la SCI du petit jardin RG 2024040301 - jugement du 5 juin 2025 – chambre 1-7

Mots-clés :
ASSURANCE / Assurance dommages dont perte d’exploitation - Déclaration inexacte de l’assuré

Points de droit 

La renonciation à une indemnisation ne peut résulter que d’une volonté claire et non équivoque - Même si la charge de remise en état de locaux incendiés appartient au propriétaire, l’assureur du locataire doit l’indemniser si le contrat l’a prévu - L’assureur, subrogé dans les droits de son assuré, ne peut exciper de plus de droits que celui-ci.

 

 

MS Sciences, ci-après MS, est locataire de locaux pour lesquels elle a souscrit un contrat d’assurance auprès de GENERALI IARD ; le propriétaire des locaux, lui, est assuré auprès des ACM. Lesdits locaux ont été endommagés par un incendie ; un expert, mandaté à la suite de cet incendie, a estimé les coûts de remise en état des locaux, du matériel et des câblages et dit que la charge devait en être supportée, pour les coûts de nettoyage et de remplacement des mobiliers, par MS, et pour ceux relatifs à la remise en état des câblages et des locaux, par son propriétaire. Après que MS a supporté la totalité des coûts, Generali lui en a remboursé la seule partie relative aux mobiliers et a obtenu une quittance subrogative donnant solde de tout compte à l’assuré. ACM a refusé de mobiliser sa garantie.

 

MS a alors saisi le tribunal de céans afin de voir Generali et ACM condamnées à prendre en charge le remboursement des coûts des travaux qu’elle avait supportés et qui ne lui avait pas encore été remboursés.

 

Cette affaire soulève trois questions : la quittance subrogative signée par MS pour solde de tous comptes, sur la foi du rapport d’expert, s’oppose-t-elle à ce que Generali puisse être condamnée à l’indemniser du solde des travaux ? Generali peut-elle opposer à MS le fait que la remise en état de locaux doit être supportée par le bailleur ? La non-connaissance par Generali d’une clause du bail stipulant la renonciation par MS à tout recours contre son bailleur et contre l’assureur de celui-ci, doit-elle conduire à limiter le montant de remboursement pour déclaration inexacte ?

 

  1. Sur les conséquences de la quittance subrogative donnant solde de tout compte

GENERALI fait valoir que MS, après avoir été indemnisée des seuls frais de remplacement des mobiliers, lui a signé un « pour solde de tout compte et sans réserve à titre d’indemnité définitive ». MS réplique que son consentement a été vicié par le rapport d’expert et demande au tribunal de prononcer la nullité de la quittance.

Le tribunal rappelle que la renonciation à un droit ne peut résulter que d’une volonté claire et non équivoque de renoncer ; or, il constate que MS a pu considérer, en signant la quittance subrogative, que cette dernière ne valait que pour les biens mobiliers et qu’elle n’avait jamais indiqué qu’elle entendait renoncer à l’ensemble des droits à indemnité auxquels elle pouvait prétendre.

Le tribunal dit «  la créance subrogative pour solde de tout compte valide mais limitée à ses effets aux dommages causés aux biens mobiliers ». 

 

 

  1. Sur l’opposabilité des règles du droit immobilier à l’assuré

GENERALI conteste devoir prendre en charge les coûts de remise en état des locaux, qui ont pour objet de les rendre conformes à l’usage pour lesquels ils ont été loués, en rappelant qu’ils doivent être supportés par le bailleur.

Le tribunal constate que le contrat souscrit par MS stipule que sont couverts « les dommages matériels au bâtiment ainsi qu’aux matériels … ». Il relève que cette assurance multirisque de type IARD concerne donc aussi bien la protection des biens mobiliers qu’immobiliers et que la garantie, en cas d’incendie, ne prévoit pas de clause d’exclusion, ni de limite de garantie hors le plafond de 150 000 €.

En conséquence, le tribunal dit que MS est fondée à réclamer l’indemnisation de ses préjudices, pour autant qu’elle en justifie l’existence.

 

  1. Sur l’opposabilité d’une clause d’un contrat non révélée à l’assureur

GENERALI fait valoir qu’elle n’avait pas connaissance de la clause du bail de renonciation de MS à tout recours, en cas d’incendie, contre son bailleur ainsi que contre l’assureur de celui-ci. Or dans ce cas, en vertu de l’article L.113.9 du code des assurances, elle ne peut être tenue à une réparation intégrale en raison de cette omission ou déclaration inexacte même involontaire (application de la règle proportionnelle).

Le tribunal relève que la clause de renonciation à tout recours est valable, qu’elle reflète la volonté du preneur et du bailleur, ne se heurte à aucune disposition d’ordre public et que, « en tant que subrogée dans les droits de son assurée, Generali ne peut exciper plus de droits que celle-ci ».

Le tribunal dit qu’il appartenait à Generali de solliciter la communication du bail et que, « en ne sollicitant pas ladite communication, Generali a commis une négligence fautive dont elle ne saurait faire supporter les conséquences à son assurée ».

En conséquence le tribunal retient donc les préjudices dans leur intégralité, pour autant que leur existence soit établie.

 

 

Article L. 113.9 : « l’omission ou la déclaration inexacte de la part de l’assuré, dont la mauvaise foi n’est pas établie, n’entraîne pas la nullité de l’assurance. Dans le cas où la constatation n’a lieu qu’après un sinistre, l’indemnité est réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues si les risques avaient été complètement et exactement déclarés »


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