SA PIERRES INVESTISSEMENT contre Monsieur T. RG 2024073775 - ordonnance du 30 avril 2025
CONTRATS ET OBLIGATIONS / Novation - Substitution de débiteur
Sommaire :
Un protocole transactionnel portant sur l’exécution d’un contrat vaut-il novation ? Le paiement par une filiale d’une partie des dettes de sa mère vaut-il substitution de débiteur et engagement pour la filiale d’honorer le solde de la dette de sa mère ?
M. T a souscrit à des produits d’investissement «ICBS RENDEMENT PATRIMOINE» proposés par la société MARNE ET FINANCE, à savoir des parts sociales des SCS DIDEROMMAG et FONTAINEIMMAG, toutes deux filiales de MARNE ET FINANCE. Pour chacune de ces souscriptions, la société MARNE ET FINANCE a consenti une promesse de rachat.
MARNE ET FINANCE n’ayant pas honoré son engagement de rachat, lors de la demande formulée par M.T, ces parties ont conclu, en 2021, des protocoles transactionnels prévoyant un échéancier. Seules les trois premières échéances ont été honorées, réglées par DIDEROMMAG et FONTAINEIMMAG.
A la suite de la liquidation judiciaire de MARNE ET FINANCE en 2023, DIDEROMMAG et FONTAINEIMMAG ont été absorbées par la société PIERRES INVESTISSEMENT.
Les protocoles de 2021 n’ayant pas été honorés au-delà des trois premières échéances, M. T a obtenu du juge des requêtes une ordonnance l’autorisant à faire pratiquer des saisies sur les comptes de la société PIERRES INVESTISSEMENT, venant aux droits de DIDEROMMAG et FONTAINEIMMAG. Les contestant, PIERRES INVESTISSEMENT a demandé la rétractation de l’ordonnance.
Les parties s’opposent sur l’existence d’une créance fondée en son principe, première condition pour justifier une saisie conservatoire.
M. T rappelle que les promesses initiales de rachat prévoyaient une faculté de substitution, que DIDEROMMAG et FONTAINEIMMAG, présentes au protocole de 2021, se sont effectivement substituées à MARNE ET FINANCE pour l’honorer et ont, de fait, réglé les premières échéances.
PIERRES INVESTISSEMENT soutient, pour sa part, que les promesses initiales n’existent plus puisque les protocoles ont opéré novation et que DIDEROMMAG et FONTAINEIMMAG n’ont pris aucun engagement aux termes des protocoles de 2021.
Le juge des référés retient :
- Qu’il n’y a pas eu novation : aucune mention n’en est faite dans les protocoles et une novation ne se présume pas. Le seul objet des protocoles était d’échelonner les paiements que MARNE ET FINANCE ne pouvait faire immédiatement. Les promesses de rachat existent toujours.
- Même si ces promesses font mention de la faculté pour MARNE ET FINANCE de se substituer un tiers, en s’en portant garante, il s’agit uniquement d’une faculté, qui, en l’espèce, n’a jamais été mise en œuvre par MARNE ET FINANCE, ni acceptée par DIDEROMMAG et FONTAINEIMMAG.
- DIDEROMMAG et FONTAINEIMMAG ne peuvent avoir été engagées par les protocoles de 2021, auxquels elles ne sont pas parties. Ces protocoles ont simplement été conclus « en leur présence » (car il s’agissait de leurs propres parts sociales), ce qui ne peut créer aucune obligation pour elles.
- Le fait qu’elles aient réglé les trois premières échéances moratoriées ne les oblige à rien. Elles ont simplement payé pour compte de tiers, sans aucune substitution, conformément à l’article 1342-1 du code civil. C’était, en l’espèce, d’autant plus naturel qu’il existait des conventions de trésorerie entre MARNE ET FINANCE et ses filiales.
Le juge en conclut que M. T ne démontre pas un principe de créance à l’égard de la société PIERRES INVESTISSEMENT et ordonne la mainlevée des saisies conservatoires.