SAS YVES DORSEY vs SA CARREFOUR MARCHANDISES INTERNATIONALES RG2023036306 - jugement du 20/03/2025 - chambre 1-6
IRRECEVABILITE / Défaut de conciliation/médiation préalable
Sommaire :
Procédure préalable de conciliation/médiation prévue contractuellement - l’ensemble des différends doit être débattu dans ce cadre - le non-respect de cette condition entraîne l’irrecevabilité des demandes présentées en justice.
La société YVES DORSEY a une activité de confection vestimentaire et commerce de gros d’habillement. Elle a entretenu des relations commerciales avec CARREFOUR MARCHANDISES INTERNATIONALES (ci-après désignée CARREFOUR) durant de nombreuses années au travers de conventions annuelles de partenariat.
Le 21 mars 2022, CARREFOUR confirme la décision, qu’elle dit prise d’un commun accord, de cessation immédiate de la relation commerciale.
DORSEY conteste avoir souhaité interrompre la coopération et, après différents échanges, CARREFOUR propose de poursuivre la relation jusqu’à la saison printemps-été 2024.
DORSEY estime cette solution non satisfaisante et, se référant à la procédure préalable de conciliation/médiation prévue contractuellement en cas de différend entre les parties, adresse, après l’échec de la conciliation, une requête en médiation au Centre de médiation et d’arbitrage de Paris (CMAP). Le médiateur désigné constate l’échec de la médiation et DORSEY assigne CARREFOUR devant le tribunal.
Le tribunal note que DORSEY formule dans son assignation des demandes portant sur la responsabilité délictuelle au titre de la rupture brutale de la relation commerciale établie, ainsi que des demandes au titre de manquements contractuels à la convention de partenariat (ristourne conditionnelle octroyée sans contrepartie, annulation de bons de commande valant engagements fermes d’achat…). Pour CARREFOUR, ces dernières demandes sont irrecevables dès lors qu’elles n’ont pas été abordées dans le cadre de la procédure préalable de conciliation/médiation telle que prévue au contrat en cas de différend.
DORSEY rétorque que « le présent litige porte sur l’exécution de la convention de partenariat, les manquements contractuels ayant abouti à une rupture brutale des relations commerciales établies sans respect du préavis » ; de plus, les demandes en indemnisation, autres que celles concernant la rupture brutale de la relation commerciale, portent sur le même document contractuel et sont, à tout le moins, connexes.
Le tribunal retient que les demandes de DORSEY portent sur différents préjudices et relèvent, pour une part, de la responsabilité délictuelle de CARREFOUR, pour l’autre, de la responsabilité contractuelle ; or seule la rupture brutale de la relation a été formellement évoquée alors que l’article 9.2 de la convention prévoit que l’ensemble des différends doit être débattu : « avant toute action contentieuse, les parties chercheront de bonne foi à régler à l’amiable leurs différends… ».
Enfin, DORSEY a adressé au CMAP une demande de médiation en indiquant qu’«un différend est récemment apparu entre les parties, CARREFOUR ayant notifié la fin de la relation commerciale au 21 mars 2022 ».
Il ressort de ce qui précède que la procédure de règlement prévue à l’article 9 a donc uniquement porté sur la rupture brutale de la relation commerciale établie qui met en cause la responsabilité délictuelle de CARREFOUR et non sa responsabilité contractuelle.
Le tribunal dit irrecevables les demandes de DORSEY au titre des manquements contractuels reprochés à CARREFOUR et enjoint aux parties de conclure au fond sur la rupture brutale alléguée.