SOCIETE WHITE ROCK, SAS SAMSUNG ELECTRONICS France, vs SAS VERY FRET SAS VERY FRET vs SASU TAB 89 RG J2023000305 - jugement du 27/03/2025 - chambre 1-7
Mots-clés :
TRANSPORTS / Routier
Points de droit :
Faute inexcusable du transporteur : critères – conséquence.
La société SAMSUNG ELECTRONICS France, ci-après SAMSUNG, assurée auprès de la compagnie WHITE ROCK, a confié à la société VERY FRET, en sa qualité de commissionnaire de transport, l’acheminement de téléviseurs à enlever chez son prestataire logistique.
La société VERY FRET a affrété la société TAB 89 pour procéder au transport.
Alors que le camion était stationné en cours de voyage sur un site où la société TAB 89 dispose de trois emplacements pris à bail, la marchandise a été volée dans le camion.
SAMSUNG a été intégralement indemnisée de son préjudice, estimé à la somme de 100 314,46 €, par son assureur qui se déclare subrogé dans ses droits.
WHITE ROCK n’ a été indemnisé ni par le commissionnaire VERY FRET, ni par l’assureur de ce dernier AXA, ni par le transporteur TAB 89.
C’est ainsi que se présente le litige.
Le tribunal, en premier lieu, constate que l’indemnisation de SAMSUNG par son assureur a été totale, que SAMSUNG n’a plus d’intérêt à agir dans la présente cause, et que WHITE ROCK est valablement subrogée dans les droits de SAMSUNG.
Le tribunal retient que le transporteur a une obligation de résultat et est donc responsable de la perte de la marchandise, mais il convient de déterminer si celui-ci a commis une faute inexcusable, seule susceptible d’écarter les limitations légales des indemnités à la charge du transporteur.
Le code de commerce (article L.133-8) définit comme inexcusable « la faute délibérée qui implique la conscience de la probabilité du dommage et son acceptation téméraire sans raison valable » ; le tribunal note que rien ne permet de caractériser une faute délibérée car, si le semi-remorque devait être stationné dans un lieu sécurisé et gardienné, tel était bien le cas.
De même, rien ne permet de caractériser une faute inexcusable dans la mesure où le transporteur pouvait ignorer la valeur de la marchandise transportée car la seule indication qui lui a été fournie était « marchandise sensible » ; il ne peut être retenu que le transporteur avait conscience de la probabilité du dommage puisqu’il ignorait la valeur de la marchandise transportée.
Enfin, pour être inexcusable, l’acceptation du risque du dommage entraîné par la faute doit avoir été téméraire et, dans le cas présent, le transporteur n’a pas pris de risque de manière téméraire puisque le site où il s’est arrêté lui était connu et qu’il y faisait régulièrement halte.
Le tribunal retient que TAB 89 n’a pas commis de faute inexcusable et qu’en conséquence l’application des plafonds d’indemnisation pour la réparation du dommage subi, soit la somme de 9 000 €, est déterminée par le contrat type des transports publics en l’absence de contrat de transport spécifique.
Enfin, le commissionnaire VERY FRET est responsable de sa faute personnelle éventuelle comme de celle de ses substitués. Le commissionnaire a sous-traité le transport à TAB 89 en transmettant les directives fournies par SAMSUNG et en agissant conformément au contrat cadre qui le lie à SAMSUNG ; aucune faute personnelle ne peut donc être retenue. Néanmoins, VERY FRET supporte la même responsabilité que son substitué TAB 89.
Le tribunal condamne solidairement TAB 89, VERY FRET et AXA à payer à WHITE ROCK la somme de 9 000 €.